Les TLA font leur cinoche
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1 février 2013 5 01 /02 /février /2013 10:00

Argentine, les 500 bébés volés de la dictature

(2013)

 

 

A l'occasion de la 26e édition du FIPA (Festival International du Programme Audiovisuel) concourt dans la catégorie « Reportage » ce documentaire d'Alexandre Valenti.

 

 

        Il s'intéresse ici au combat de celles que l'on appelle les « Grands-mères de la place de Mai » qui, depuis 1977, recherchent sans relâche leurs petits-enfants enlevés à la naissance par des hommes au service de la dictature militaire.

 

       En effet le 24 mars 1976 a lieu le coup d'état qui place à la tête de l'Argentine le général Jorge Rafael Videla ; le pays entre alors dans une ère dictatoriale qui ne prendra fin qu'en 1983 avec l'élection au suffrage universel de Raúl Alfonsín à la présidence de la république.

 

       Durant ces 7 années de dictature les opposant(e)s au régime étaient sévèrement réprimés. Outre les morts, on parle aujourd'hui surtout des « desaparecidos » qui, comme leur nom l'indique, sont des individus (pour la plupart de jeunes étudiants ou ouvriers) ayant mystérieusement disparus à cette époque. Parmi eux se trouvaient des femmes enceintes. Elles ont été pour la plupart enfermées avec d'autres insurgés dans l'ESMA (à l'époque Ecole Supérieure de Mécanique de la Marine, aujourd'hui Musée de la Mémoire dédié au 30 000 « disparus » de la dictature) où elles accouchaient avant d'être exécutées et leur nouveau-né confié à une famille alliée au régime.

 

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        Ce sont les procès sur ces vols de bébés (entre 2011 et 2012) et ayant abouti à la condamnation de 8 figures de la dictature (Videla, Bignone...) qui ont donné envie au réalisateur franco-argentin de tourner ce reportage. En effet malgré le tragique du sujet, Alexandre Valenti préfère considérer son film comme un message d'espoir puisqu'ici les héroïnes sont des femmes comme les autres qui ont pourtant réussi à mobiliser le monde entier (par exemple : de 1979 à 1982 avait lieu chaque jeudi en France une manifestation devant l'ambassade d'Argentine), à faire avancer la recherche sur le test génétique qui n'était alors qu'à ses balbutiements, et qui sont finalement parvenues à faire tomber de célèbres criminels de guerre.

 

            Sur le plan de la construction ce documentaire très accessible alterne les témoignages des grands-mères, des petits-enfants retrouvés, des images d'archives ainsi que des reconstitutions toutes deux  accompagnées d'une voix off. On remarque des reconstitutions de deux types : les premières sont faites à l'ordinateur et montrent à quoi ressemblait l'ESMA lorsqu'elle servait de camps de prisonniers. Plutôt bien faites, on peut néanmoins regretter que l’icône de la souris d'ordinateur soit au beau milieu de l'image. Les secondes sont des sortes de saynètes très brèves tournées en caméra subjective de manière à ce que le spectateur ressente l'angoisse de ces femmes enceintes opposées au régime.

 

           Bien que le récit joue sur la corde sensible du spectateur il ne sombre jamais dans le pathos, et si l'abondance des témoignages le rend quelque peu confus il permet aussi de bien cerner ce qu'ont ressenti les grand-mères mais également leurs petits-enfants qui a 20 ou 30 ans se sont découverts une nouvelle identité.

 

            En effet le thème de ce documentaire est sans l'ombre d'un doute celui de l'identité : celle de ces nourrissons enlevés à leurs parents et qui découvrent, à l'âge adulte pour la plu part, que toute leur existence repose sur un mensonge ; mais aussi en filigrane, celle de leurs ravisseurs qui prétendent les aimer comme leur propre enfant mais n'hésitent pas, le jour du procès, à les accuser de leur malheur. Si la psychologie de ces gens n'est pas du tout abordée dans le film, un point commun ressort dans la plupart des témoignages de leurs « enfants » à savoir l'impression de ne pas appartenir à cette famille, de ne pas être vraiment aimés.

 

            Le second grand thème abordé ici est celui des Mémoires. En effet de 1983 jusqu'en 2004 sont proclamées des Lois d'Amnistie immunisant tous les membres de l'armée contre d'éventuelles poursuites judiciaires pour des faits datant de la dictature militaire. Cette politique de l'oubli en guise de pardon n'est pas sans rappeler celle de la France au lendemain de la 2nd Guerre Mondiale. Ainsi il faut attendre l'arrivée de Néstor Kirchner à la tête de l'Etat pour que ces lois soient abolies et que l'Argentine ose enfin faire face à son passé. Les actions de ce président dans ce sens ont d'ailleurs été nombreuses puisque la même année il ordonne le retrait des portraits de Videla et Bignone des murs du Collège Militaire et le même jour demande officiellement et pour la 1ère fois au nom de l'Etat, pardon aux victimes de la dictature.

 

            Notons à ce propos que l'Argentine est aujourd'hui le seul pays à juger ses propres citoyens pour crime contre l'humanité et que 80% des argentins sont favorables à ces procès.

 

 

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Seules 4 de ces grands-mères sont toujours aptes à continuer les recherches, leurs petits-enfants poursuivent leur œuvre.

 

A ce jour 107 enfants ont été retrouvés par l'Association des Grands-Mères de la Place de Mai.

 

 

Carole

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